LE TRAVAIL
SE POURSUIT
Nous avons installé à la
Poterie du Carbassou à Rasiguères le
deuxième laboratoire non utilisé. De
nombreuses cuissons y ont été
réalisées. Une constatation s'impose : si la
sole se comporte bien à l'utilisation, le couvercle,
quant à lui, supporte mal les chauffes successives.
Sur les deux exemplaires de laboratoires
réalisés, des fissures sont rapidement
apparues, puis des fentes rendant sa manipulation impossible
après deux ou trois cuissons. Le four installé
à la poterie a rapidement subi quelques
transformations afin de pouvoir continuer à
l'utiliser. Le couvercle est devenu fixe. On a
supprimé la partie centrale et la cheminée (
Fig. 4 ). L'enfournement se fait désormais par cette
ouverture et le four est refermé par des tessons de
céramique, ce qui lui donne une structure proche d'un
four médiéval.
Comme il semble difficile de savoir si le
four retrouvé à Sévrier a
été utilisé de nombreuses fois ou si,
lui aussi, s'est rapidement dégradé, nous ne
pourrons pas porter de conclusion sur sa forme curieuse. Il
semble difficile, même avec des matériaux
différents de ceux que nous avons utilisés, de
réaliser un four sur ce plan sans qu'il se fissure
rapidement. Néanmoins, ces expérimentations
ont montré clairement le côté
fonctionnel de cette structure de cuisson.
La possibilité, déjà
démontrée par Philippe Andrieu, d'atteindre
des températures élevées, que ce soit
en ambiance oxydante ou réductrice, et ce, avec un
temps de chauffe qui ne dépend que de la
capacité de la terre des pots à
résister au choc thermique. Si P. Andrieu l'avait
porté en 900° en 35 heures, pour notre part,
à Tautavel, nous l'avons monté en 8 heures;
mais lors de cuissons suivantes, il nous est arrivé
avec une terre suffisamment dégraissée de le
monter en 3 heures. La preuve est donc faite des
possibilités thermiques de cette structure de cuisson
qui, si elle date de L’âge du Bronze, n'en est pas
moins très actuelle dans sa conception.
Dans l'état actuel de nos
connaissances, il semble que peu de structures de cuissons
céramiques antérieures au Bronze Final ait
été retrouvées. L'homme était
pourtant capable d'en maîtriser les aspects
techniques. A cette époque, il pratiquait
déjà depuis longtemps, la réduction et
la fusion des minerais de cuivre et d'étain. Les
techniques spécifiques de ce travail lui
étaient connues. Il était donc en mesure de
construire et de faire fonctionner des structures thermiques
complexes capables d'atteindre des températures
élevées largement supérieures à
celles nécessitées par la cuisson des
poteries. Il est intéressant de constater que les
premiers fours de potiers bien identifiés ( le four
de Sévrier en est un exemple) comportent
déjà tous les éléments
constitutifs d'un four à tirage vertical traditionnel
: foyer, chambre de chauffe, sole perforée,
laboratoire... Tout ceci laisse penser qu'il a dû
exister antérieurement, des structures moins
élaborées faisant la transition entre les
foyers ouverts Néolithiques et les fours
déjà sophistiqués du Bronze
Final.
Quelques éléments
trouvés lors de fouilles peuvent faire penser
à des fours primitifs : terre rubéfiée,
éléments de pisé cuit. Il est parfois
compliqué de faire la différence entre foyer
domestique ( four pour les aliments) et four de potier. Il
faudra attendre que la chance permette de découvrir
une structure bien conservée sans équivoque
quant à son utilisation céramique pour mieux
comprendre l'évolution des techniques de cuissons
céramiques depuis le néolithique.
Depuis 1994, notre approche de l'enfumage
a nettement évolué, en particulier au contact
des potiers catalans et portugais qui pratiquent toujours
cette technique traditionnelle. Nous utilisons à cet
effet du combustible sec d'un diamètre qui peut
varier de la simple brindille à des sections de trois
ou quatre centimètres. L'important est d'obtenir un
fort dégagement de fumée et de supprimer toute
entrée d'air dans le four. Les températures
critiques se situant globalement entre 700° et
400°. Mais la terre enfumée n'est pas l'objet de
cet article, nous aurons l'occasion de revenir plus tard sur
ce vaste sujet qui touche à la fois toutes les
époques de la préhistoire à nos jours
et quasiment toutes les civilisations qui ont
pratiqué la céramique
Expérimentation menée par M. Jean-Marie GIORGIO (Céramiste ) au
sein de l’association pour les Journées de la Céramique
avec la participation de :
Dominique ALLIOS, Archéologue /
Université de Rennes
Bernadette BONAFOUS, Céramiste / Poterie du
Carbassou
Jacques PERNAUD, Conservateur / Musée de
Tautavel Centre Européen de Préhistoire
Miche PERRON d’ARC, Adjoint - Conservateur /
Musée de Sallèles d’Aude
Valérie PORRA, Conservateur /
Château-Musée de Bélesta
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